La solitude du coureur de fond... dans la forêt de Maron
TRAIL DES LUMIERES A NANCY
35 km – 600 m D+ / Oct 2017
Octobre ! Voilà que sonne la fin de la saison de trail... Tandis que certains d'entre nous ont eu la chance de participer au festival des Templiers ou au Grand Raid de la Réunion (dont nous parlerons très prochainement...), j'avais envie de vous faire partager mon expérience sur le trail des Lumières à Nancy. Une course, qui grâce à un coup d'envoi donné en pleine ville et un concept original - courir la nuit – connaît chaque année un beau succès populaire. Pour cette nouvelle édition, 1 800 coureurs se sont donnés le mot pour participer à l'un des trois formats proposés (12, 20 et 33 km). Cette année, Ludivine et Bertrand, les patrons de la course, ont averti les coureurs : il y aura quelques bosses en plus et deux kilomètres de rab' pour les deux plus longues distances. Miam !
Minis traileurs
Comme souvent pour cette course, à laquelle j’ai déjà participé, nous profitons ce samedi 14 octobre d'une journée d'été indien... Les coureurs et les familles savourent le moment d'autant que l'après-midi s’ouvre sur les minis-trails de nos bambins menés au profit de l’association du Rire médecin. L’ambiance est sympa. Le soleil chauffe dans le parc du château de Rémicourt à Villers-lès-Nancy juste derrière la fac des sciences du sport. Nous voilà au coup d’envoi du 33 km… euh, 35 km semble-t-il aux dernières informations. Il est 17h30. La plupart des coureurs arborent leur frontale même si elle ne sera vraiment utile qu’à partir de 19h… A cette heure-là, le duathlète Benjamin Choquert abordera le dernier segment de sa folle cavalcade dans les bois de Maron et la forêt de Haye, lui qui expédiera la course en 2h25 (3h07 pour la première féminine, Marion Rémy). Qu’importe le temps, pourvu que le plaisir de courir soit au rendez-vous ! C’est dans cet esprit que je sillonne tout d’abord cette forêt que je connais bien pour m’y entraîner chaque week-end. Les cambrures des 14 premiers kilomètres nous rappellent que nous sommes bien lancés dans un trail. Hi, ha ! Allez, on s’aide un peu des mains ! Le premier ravitaillement au 14ème km se présente pour moi au bout d’1h40 de course.
Ciel étoilé...
C’est là que les parcours du 22 et du 35 km se séparent. La nuit s’est installée et il faut désormais faire plus attention au balisage, bien repérer les rectangles réfléchissants, sésames qui en désorienteront plus d’un dans le peloton ! Juste après le ravitaillement, la forêt nous ouvre à nouveau ses bras. Je me sens alors si bien que j’en glisse de joie dans une flaque de boue. P… ! La mère Belette poursuit sa route zébrée d’une bande de terre de la pointe de la basket à l’épaule droite. Heureusement, personne ne m’a vue ! Hi, hi ! C’était sans compter une seconde chute deux kilomètres plus loin sur une racine fourbe ! De deux choses l’une, où je me décide à ouvrir grand les yeux ou je ralentis. Je fais les deux, histoire de sortir saine et sauve de cette aventure… Et au passage, je règle mieux ma frontale. Le parcours nous réserve une ou deux descentes glissantes. Je fais de mon mieux pour ne pas jouer les Bécassine à nouveau. Il y a aussi cet interminable faux plat qui nous conduit au second ravitaillement. J’évolue seule. Mais devant moi, je vois un point de lumière qui vacille de temps à autre. J’essaie de ne pas le perdre. Déjà 3h de course au 25ème kilomètre. Il fait plus frais. Comme la plupart des coureurs, j’enfile mon coupe-vent au ravito.
… Versus côté sombre

Moment que j’espérais : les arbres laissent apparaître le ciel étoilé. La poésie de cette sortie nocturne s’impose alors pendant deux-trois kilomètres. Je papote avec un traileur sympa comme tout, qui court chaussé de Five Fingers. « Ce trail est rude à porter lorsqu'on est seul ». J'acquiesce en lui demandant s'il se remémore les difficultés à venir, car il a déjà l’expérience de cette distance en duo. "Encore quelques coups de cul... et une descente assez longue jusqu'à l'arrivée". Je laisse filer le traileur aux Five Fingers. Grossière erreur, car le ciel se referme. Et moi je ne tarde pas à sombrer moralement dans la nuit. A partir du 27ème kilomètre, le parcours était-il vraiment long ou bien est-ce juste ma tête qui a appuyé avec insistance sur la touche « game over » ?! Bon, vous voyez bien que je suis un peu de mauvaise foi… Ce que je peux dire pour ma défense, c'est que j'ai couru longtemps seule dans la forêt dense et sombre. C’est quoi l’intérêt d’empiler les kilomètres lorsque l’on ne voit rien et que l’on a soudain la trouille qu’un sanglier surgisse ? Rassurez-vous, je ne croise finalement que les 4x4 de l’organisation aux principales intersections… N’empêche, cette nuit me pèse et je perds peu à peu confiance en moi. Je cours, puis, je marche, puis je cours… Bref, j’ai vraiment envie de jeter l’éponge. 31ème kilomètre. Une dernière grimpette. Voilà qui est fait ! Je me mobilise un peu pour rationaliser la situation : il ne me reste plus que 4 kilomètres à tirer. D'ailleurs, je reconnais les sentiers aux abords de la passerelle qui passe au-dessus de l'A33. Je continue de trottiner au radar. La nuit me semble un tunnel inexorable. Mais voilà que la sortie de la forêt approche. Quelques bénévoles font traverser les derniers coureurs dont je fais partie. Hop, hop, direction le plateau de Villers-lès-Nancy. La lune nous éclaire enfin. Et le finish se profile, où je retrouve mon traileur aux Five Fingers : "ah, tu as fini par arriver ! ". Je me suis dit la même chose en regardant ma montre : 4h33. C'est pas trop tôt !