Des cailloux, des bras et du cœur pour l’Echappée belle
RENDEZ-VOUS - Pour qui sonnera la cloche à l’arrivée de l’Echappée belle ? Du 25 au 27 août, plus de 600 coureurs vivront cette grande balade en montagne comme le point d’orgue de leur saison. Au-delà des chiffres et des difficultés réservées par cet ultra hors-norme, qu’est-ce qui fait battre le cœur de cette organisation ?
Elle a l’habitude d’être présentée comme « la course la plus exigeante de France » avec ses 149 km pour 11 300 m de D+, un trail technique qui traverse la chaîne de Belledonne de Vizille en Isère à Aiguebelle en Savoie suivant un parcours privilégiant l’altitude. Plus costaud que l’UTMB, dont la distance et le dénivelé sont pourtant proches ; plus généreuse sur les barrières horaires que l’ultra tour du Beaufortain ou l’X-Alpine du trail du Verbier Saint-Bernard, l’Echappée belle s’est taillée une place de choix dans le calendrier des grands ultras français. Remportée par Jean-Marie Thevenard (23h51) et Sarah Vieuille (27h10) en 2022 aux termes d’un parcours légèrement raccourci en raison d’une météo maussade, elle rappelle aux coureurs qu’ils devront composer avec la patience et la modestie pour évoluer dans Belledonne.
« Depuis la première édition en 2012, on s’est vite fait une identité » commente Florent Hubert, Président de l’association organisatrice de l’événement, entrepreneur dans la vie quotidienne et créateur de la course. « La particularité du massif de Belledonne est qu’il donne l’impression que l’on est en haute montagne alors que l’on reste sur des sentiers de moyenne montagne. Les paysages sont souvent désertiques… Les cailloux sont la vraie difficulté du massif. L’absence de végétation – on est souvent au-dessus de 2 000 mètres – n’offre que peu d’endroits aux coureurs pour s’abriter du soleil jusqu’à la base de vie du Pleynet ». Ami traileur qui t’apprête à prendre le départ de la traversée intégrale, rassure-toi, si les 60 premiers kilomètres de l’Intégrale ont la réputation d’être raides, la seconde partie du tracé réserve elle aussi ses difficultés avec le col de Moretan (86ème km), dont la descente sur le névé et la moraine est encordée chaque année, ou encore la crête des Férices (110ème km) et « ses bosses interminables » aux dires de Florent Hubert qui a aussi vécu l’Echappée belle de l’intérieur, comme concurrent, en 2016.
2 tonnes de matériel à Périoule

Une fois que l’on s’est bien foutu la pétoche en parcourant (pour la énième fois) le roadbook et que l’on a expié toutes ses velléités de super-héros auprès de son entourage, l’Echappée belle, c’est quoi d’autre qu’une ultra-difficile bambée ? Bénévole depuis la première heure sur la course, Philippe Mermoux, 71 ans rappelle « la dimension humaine et affective très importante de l’épreuve » qui relie les bénévoles, les coureurs et les habitants du territoire. Des anecdotes sur son expérience de la logistique de l’Echappée belle, il en a plein. Comme celle de la création du ravitaillement de Périoule (90ème km) à 1 900 mètres d’altitude
: « A la base, le site ne devait être qu’un point de contrôle des coureurs. On avait quand même pris l’initiative de monter des soupes chinoises… Ca correspondait à un sac de 35 kilos pour moi et d’une douzaine de kilos pour mon épouse. On a fait connaissance avec le berger du coin et de sa famille qui nous a tout de suite aidé à nous installer. Le ravito s’est rapidement avéré indispensable. L’année suivante, on a monté les 300 kilos du ravitaillement à dos d’ânes. Aujourd’hui, 2 tonnes de matos sont déposées en hélicoptère pour nous permettre de déployer un point de ravitaillement tout à fait impressionnant ! ». Sur la course, le lien entre les bénévoles et les traileurs est fort. Florent Hubert conseille d’ailleurs d’en profiter pleinement : « Les intervalles sont parfois longs entre deux ravitaillements. Il ne faut pas hésiter à s’ouvrir aux bénévoles et ne pas faire de ravitos express. C’est un atout majeur pour arriver au bout de la course ».
Un événement de territoire
Cette course qui « fait briller les yeux » de ceux qui en parlent, c’est une belle histoire qui a permis de mobiliser progressivement 650 bénévoles. Plus rien à voir avec la première édition qui réunissait 150 personnes. « Nous avons appris de nos erreurs, année après année, pour faire monter en puissance notre organisation » explique Florent Hubert également à la tête de l’organisation du Grand Trail du lac du Bourget. Comme l’explique Fabien Couzon, responsable de l’organisation technique de l’événement et l'un des deux salariés de l’association, le balisage mobilise ainsi toute une équipe sur les 15 sections à arpenter, elle-même épaulée par un encadrant au volant d’un minibus chargé de déposer et récupérer les bénévoles engagés dans cette mission de confiance.
« Surtout, nous avons réussi à fédérer les acteurs du territoire, les communes du massif notamment, en construisant un trail représentatif de Belledonne et respectueux de la montagne » poursuit le créateur de la course dont le charisme est reconnu. Dans cet esprit, l’association investit une partie de sa trésorerie dans l’entretien des sentiers, la restauration de passerelles… En projet, la rénovation d’une « cabane de montagne » pour la transformer en lieu d’accueil pour les structures associatives. Et il y a aussi cette idée un peu folle : « réduire notre empreinte carbone en montant les ravitaillements de la Pra (27ème km) et Jean Collet (38ème km) à dos d’homme. Une expérience que nous avons faite cette année en montant 280 kilos de sel au refuge de Combe Madame. Un ravitaillement, c’est 800 kilos de matériel. Je suis sûre que c’est possible avec une belle mobilisation ». Allez, ça c’est pour la prochaine édition et si cela se fait, on sera de la partie, promis ! Le temps est venu de profiter des sentiers de Belledonne et de goûter les cailloux jusqu’à la lie.
L’Echappée belle, en bref :
L’Echappée belle, ce n’est pas qu’un ultra, quatre courses composent cette manifestation qui rassemblera 2 100 coureurs dans Belledonne du 25 au 27 août : l’Intégrale (149 km et 11 300 m D+) ; la Traversée nord (88 km et 6 500 m D+) ; le parcours des crêtes (64 km et 4 800 m D+) et la Syrace du Rocher blanc (21 km et 2 000 m D+). Afin de partager avec encore plus de traileurs les sentiers de ce terrain de jeu quatre étoiles, l’organisation envisage la création d’une course de 40 km en 2024.
Plus d’infos sur https://www.lechappeebelledonne.com